Podcasts / Anima

Prologue

Une création originale de Loulou Robert

Durée 00:05:32 - Publié le 17 février 2025

© Margaux Simon

Une vache dans un champ. Un oiseau sur une branche. Une tranche de jambon. Un chat sur le canapé. Les animaux. On les caresse. On les étudie. On les élève, les apprivoise. On les tue. On les découpe. On les mange. On les aime. On a besoin d’eux. On les oublie. On les craint. On les achète. On leur donne des noms, des intentions, des fonctions. On détruit leurs habitats. On les transforme. On les défend. On se bat pour eux. On est tous liés d’une manière ou d’une autre à eux. Il n’y a pas deux mondes : le monde animal et le monde des hommes. On vit ensemble, avec, à côté. On respire le même air. On fait partie d’un tout. Et c’est de ce « tout » dont il est question ici. Ce qu’il existe entre eux et nous. Je dis « on », « nous ». Mais nous avons chacun un rapport particulier aux animaux. J’aime les animaux. Cette phrase veut tout et rien dire. Pour moi, elle veut tout dire. Mon lien à eux est quotidien. J’ai une chienne, Penny, que j’appelle aussi mon bébé, mon amour, que j’aime plus fort que la plupart des humains qui m’entourent. Je m’émerveille devant une abeille, un cheval, un moineau. Il y a quelque chose qui me bouleverse chez les animaux. Leur innocence, je crois. Certains diront que je fais de l’anthropomorphisme. Ils ont peut-être raison. Dans la rue, je remplace parfois le visage d’un humain par celui d’un animal, ça me calme. Je suis devenue végétarienne il y a quelques années pour pouvoir me regarder dans la glace. J’ai un mari qui mange de la viande avec qui je me dispute souvent à ce sujet. J’ai un grand-père chasseur. Sur mon fil Instagram : L214 et de nombreuses associations, refuges. Je me réveille avec la naissance d’un chevreau ou les images d’un abattoir. J’y pense souvent, tous les jours. L’héroïne de mon prochain roman tue des hommes et sauve des animaux. Dans les livres, c’est possible. Dans la vraie vie, c’est plus compliqué. J’ai conscience que la violence n’est pas la clé. Elle conduit à plus de violence, à la peur, à la haine. Je ne peux pas demander à un cochon ce qu’il pense, même si j’en rêve. Mais je peux demander à un homme ce qu’il pense d’un cochon. Pourquoi il l’emmène à l’abattoir. Pourquoi il le défend. Pourquoi il le mange. On est remplis de contradictions. Je porte du cuir et je me révolte devant une côtelette d’agneau. On s’arrange comme on peut. Les animaux n’ont pas ce luxe. Certains diront que la souffrance, il y’en a partout. Le monde en déborde. Ils diront, Ok les animaux, c’est triste. C’est vrai. Mais comparé, aux enfants qui meurent de faim, à la guerre en Ukraine, au génocide, au féminicide, à l’inceste, à Donald Trump, ce n’est pas grand-chose. Je ne suis pas d’accord. Et ce n’est pas parce que le monde est cruel, qu’il ne faut pas essayer d’agir à ma petite échelle. Le foutu pour foutu, je n’en veux pas ici. La souffrance animale, ce ne sera jamais pas grand-chose. L’élevage intensif, les porcelets éclatés au mur, les déterrages de renard, l’extinction des espèces sauvages, le massacre des dauphins, la liste est longue, beaucoup trop longue. Et terrible. Je vais donc m’arrêter. Je ne suis pas journaliste, pas scientifique, juste une fille qui aime les animaux et cherche à comprendre leur place dans nos vies. Une fille qui sent la colère monter à chaque fois qu’elle pense à un abattoir, et qui décide de faire quelque chose. Je ne suis pas leur sauveuse. Je n’ai pas cette prétention. Mais comme un roman, un podcast est une manière d’agir. J’ai donc voulu aller à la rencontre de différents acteurs du monde animal : éleveurs, militants, chasseurs, ancien employé d’abattoir, chercheurs, politicien, carnivores, végan. Avec ce podcast je ne cherche pas à plomber le moral, à culpabiliser, à opposer les gentils végan, aux méchants chasseurs. La réalité est plus complexe. À travers mes pensées, mon parcours, les voix des personnes que j’ai décidé d’enregistrer, j’espère rendre cette réalité. Dès mes premiers entretiens, je me suis rendu compte que quelque chose ne fonctionnait pas. Je voulais qu’Anima, à son échelle, apporte une pierre à l’édifice, qu’il pousse des gens à questionner leur rapport aux animaux. Le problème est que je ne savais pas quelle histoire je souhaitais raconter. Le problème est que, je me répète je sais, je ne suis pas journaliste. Je ne suis pas scientifique, militante. Je ne sais pas faire. Mes questions ne sont pas assez précises. Je n’ai pas les chiffres, les codes. Je parle avec mes yeux, mon ventre. La tête, c’est moins évident. J’ai passé plusieurs jours dans le flou, la boule au ventre. L’angoisse. L’envie de laisser tomber. À quoi bon ? Autour de moi, je vois des gens qui ne vont pas bien. Qui (se) font du mal parce qu’ils ne vont pas bien. Je vois croître des obsessions. De la colère. De la peur. De la souffrance humaine et animale. Et moi qu’est-ce que je fais ? Qu’est-ce que je raconte ? Dans la plupart de mes romans, j’écris à la première personne, j’ai besoin de rentrer dans la tête de mes personnages. Alors c’est dans ma tête que j’ai décidé de poser un micro. L’histoire de mon éveil au monde animal. L’histoire d’un changement, d’une perpétuelle remise en question. Anima veut questionner notre rapport aux animaux, la manière dont on les traite, les considère pour mieux nous comprendre nous-mêmes, car après tout, nous sommes tous des animaux. Des êtres vivants qui ont en commun l’anima, à savoir le principe vital, le souffle de la vie.

Crédits

Une série de podcasts menée par Loulou Robert et réalisée par Vincent Decque