« Je vous nourris et moi je meurs » : comment réconcilier fin du monde et fin du mois ?

Autoroutes bloquées, préfectures attaquées, fumier déversé devant des supermarchés, incendies, explosion… Pendant deux semaines, La colère des agriculteurs a été au cœur de l’actualité et pourtant elle n’est pas nouvelle. Cela fait des années que les agriculteurs et agricultrices ont le sentiment de ne pas être écoutés alors que leur principale revendication est de vivre dignement de leur travail. Comme beaucoup d’autres professions d’ailleurs. C’est à la mi-janvier que le mouvement de protestation du monde agricole s’est intensifié à travers des blocages, des manifestations mais aussi des actes de vandalisme et actions coups de poing. Les raisons de la colère : des revenus trop faibles face à un travail de plus en plus lourd et complexe et un sentiment de perte de sens mais aussi l’impression d'être soumis à des normes, une bureaucratie, de plus en plus absurde et contraignante. « Je suis éleveur, je vous nourris et moi, je meurs ». peut-on lire sur certaines banderoles. En moyenne, un à deux agriculteurs se suicident chaque jour, en cause leurs faibles revenus, l’endettement mais aussi le sentiment de dénigrement. Partie d’Occitanie et des agriculteurs eux-mêmes, la colère du monde paysan s’est répandue dans toute la France en quelques jours avant d’être récupérée par la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, syndicat majoritaire. Les débats ont fait rage, les revendications instrumentalisées de toute part et le mouvement est si divers qu’il est difficile de s’y retrouver… Les normes environnementales sont pointées du doigt, considérées comme trop lourdes et inapplicables, les écologistes désignés comme bouc émissaire. Mais ce que tout cela cache, c’est un système qui enferme les agriculteurs et les consommateurs dans un cercle vicieux où tout le monde semble perdant à part l’agro-industrie et la grande distribution. Tout ceci pose donc une question majeure : comment imaginer l’agriculture de demain ? Une agriculture qui rémunère dignement ceux qui la pratiquent et qui préserve les sols, l’eau, les humains ? Pour le moment, la tendance est plutôt à répondre aux problèmes sur le court terme quitte à revenir en arrière sur l’écologie, et donc à créer toutes les conditions d’une crise qui a vocation à se répéter au fur et à mesure que les conséquences du dérèglement climatique s'aggravent… Alors qu’est-ce qu’il s’est joué autour de la colère des agriculteurs ? Et que peut-on imaginer pour l’avenir ? Réponses dans décryptage de Paloma Moritz.

Crédits photo/illustration en haut de page :
Diane Lataste