Il s’agit d’un homme dont les parents perdirent la vie dans les camps de la mort ses vingt ans à peine passés ; qui vécut lui-même les camps de travail ; qui partit de sa Roumanie natale pour Paris, en 1945, dans un périple de trois années, à travers Bucarest et Vienne, notamment ; qui écrivit toute son œuvre poétique en allemand, la langue de sa mère et celle de ses assassins ; qui perdit un fils, mort-né, en 1953 ; qui fut la victime d’un scandale littéraire, accusé de plagiat, de la manière la plus arbitraire et injuste qui soit ; qui, malgré, ou au gré – ceci reste à voir – composait des poèmes, des poèmes, des poèmes. Il était né Paul Antschel, on l’appelait Paul Celan. Parler de Paul Celan, c’est parler de l’impossibilité de parler. La langue allemande, d’une part, celle du nazisme et de sa mère, qu’il continua d’écrire, par devers tout. Cette même langue qui fut celle du génocide et qu’il fallait modifier, souder, visiter, pour en refaire un langage, un « dire » envisageable, pour ravauder, à perte de trame, après le crime. Dans son discours de réception du prix de Brême, en 1958, il résumait :

Paul Celan, vers la parole

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