Le réseau Atlas : une bataille des idées menée par l’extrême-droite dans les médias français

Le réseau Atlas : une bataille des idées menée par l’extrême-droite dans les médias français

L’Observatoire des multinationales a sorti un rapport édifiant sur le combat idéologique et les stratégies que mènent des think tank libertariens et ultraconservateurs en France. Ces organisations font toutes partie du réseau Atlas, un groupe étasunien d’extrême droite très influent dans les médias et jusque dans les décisions du gouvernement.

« Le réseau Atlas, la France et l’extrême-droitisation des esprits, La machine de guerre idéologique d’une nouvelle extrême-droite, libertarienne et ultraconservatrice » c’est le nom d’une grande enquête menée par la journaliste Anne-Sophie Simpere de l’Observatoire des multinationales. Ces investigations nous renseignent sur le rôle du réseau Atlas, un groupe de think tank et d’associations qui cherchent à imposer leurs idées à l’internationale.

Libertariens et extrême-droite

Des idées d’extrême-droite à la fois contre les services publics, les aides sociales, les taxes pour les entreprises mais aussi contre le « wokisme », l’écologie ou encore l’avortement. Atlas défend principalement le milieu des affaires et les ultra-riches. « Derrière le réseau Atlas, on trouve d’influents milliardaires, des magnats du pétrole et des fondations […] On trouve aussi de grandes entreprises de secteurs comme le pétrole, le tabac ou les médicaments » peut-on lire dans le rapport.

Pour arriver à ses fins, le réseau met de nombreux outils à disposition de ses partenaires : financement de formations, stratégies de manipulation, mise en relation de dirigeants et de communicants, infiltration dans les médias… Parmi ces techniques d’influence on trouve entre autre les stratégies de la fenêtre d’overton ou de la chambre d’écho, la diffusion d’expertises biaisées, la publication de livres ou encore la simulation de mouvements citoyens spontanés.

Né en 1981 aux États-Unis, le réseau Atlas a été fondé par Antony Fisher, un libertarien notamment connu pour avoir aidé Margaret Thatcher à accéder au pouvoir. En 2023, Atlas était présent dans 103 pays et revendique 589 partenaires. Le réseau a de belles victoires à son palmarès puisqu’il aurait participé à l’élection de Donald Trump aux États-Unis et celle de Javier Milei en Argentine. Atlas a également eu de l’influence sur le rejet d’une nouvelle constitution plus progressiste au Chili, sur le Brexit mais aussi sur le référendum constitutionnel australien de 2023 qui devait donner plus de pouvoir aux communautés aborigènes et indigènes.

En France, un réseau bien implanté

L’enquête de l’Observatoire des multinationales montre que les partenaires d’Atlas en France ont une influence de plus en plus importantes dans les médias et sur nos politiques. Par exemple, il est possible que les récentes réformes de l’éducation nationale aient repris des suggestions de l’IFRAP (fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques), un lobby ultra-libéral du réseau Atlas dont la porte parole est Agnès Verdier-Molinié. Dans le journal « La Lettre » on peut lire qu’Agnès Verdier-Molinié a l’oreille de Gabriel Attal ce qui pourrait expliquer en parti qu’il applique les recommandations inquiétantes de l’IFRAP. Présentée comme une « experte », Agnès Verdier-Molinié est très présente dans les médias depuis de nombreuses années, toujours invitée pour fustiger les services publics et prôner un modèle de société radical où tout serait privatisé, sans aides sociales et favorable aux plus grandes fortunes du pays.

D’autres fondations, en lien avec Atlas, sont aussi invitées régulièrement par nos médias comme l’IREF (L’Institut de recherches économiques et fiscales) ou l’Institut Molinari. Leurs représentants sont toujours présentés comme des experts indépendants et ils peuvent alors prôner leurs idées libertariennes, faire du lobbyisme, sans aucune remise en question ou en contexte de la part des journalistes.

Une autre association, « Contribuables associés » est connue pour diffuser des informations mensongères, critiquer la fraude sociale ou les taxes sur les propriétés mais elle s’attaque aussi aux associations d’aides aux personnes migrantes par exemple. « Contribuables associés » se fait passer pour une simple association qui défendrait les intérêts des citoyens et est régulièrement citée comme une source fiable et apolitique. Elle est pourtant soutenue par de riches entrepreneurs ainsi que des politiques de droite et d’extrême-droite.

Formation

Enfin, parmi les grands partenaires du réseau Atlas en France on retrouve l’IFP, l’Institut de formation politique dont l’objectif principal est de gagner la bataille des idées de la droite radicale. Formations en communication, notamment pour être à l’aise dans les médias, création de réseaux, conseils pour les élus… De très nombreuses personnalités d’extrême-droite sont passées par l'école, que ce soit pour des interventions ou pour se former. On y retrouve des influenceurs identitaires comme Thaïs d’Escuffon et Alice Cordier, mais également des personnalités du parti Reconquête comme Samuel Lafont et Stanislas Rigault ou des journalistes avec Charlotte d’Ornellas et Geoffroy Lejeune pour ne citer qu’eux.

La majorité des partenaires du réseau Atlas se connaissent, échangent entre eux parfois passent d’une organisation à une autre. Ils se forment, ils s’organisent, se financent et ils ont réussi à se faire une place grandissante dans les médias. Leur contexte leur est plutôt favorable puisque certains médias privés, comme ceux du groupe Bolloré, partagent les mêmes intérêts et leur donne facilement la parole. Mais ces personnalités sont aussi reçues sur le service public et prisent au sérieux par le gouvernement. L'offensive libertarienne et conservatrice menée par Atlas a, décidément, de beaux jours devant elle.

On vous invite à aller lire le rapport de l’Observatoire des multinationales et (re)regarder l'épisode de Rhinocéros consacré à cette thématique :

Crédits photo/illustration en haut de page :
Diane Lataste